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7 décembre 2015 1 07 /12 /décembre /2015 07:14

Maréchal de l’Union soviétique, figure militaire majeure de l’entre-deux guerres, commandant durant la guerre civile puis dirigeant des forces soviétiques d’Extrême-Orient, Vassili Blücher fut le premier titulaire de l’ordre du Drapeau rouge et de l’Étoile rouge. Un certain nombre d’opérations militaires ont fait sa légende avant qu’il n’incarne la puissance soviétique en Extrême-Orient. Le maréchal Joukov a admis qu’il fut pour lui un modèle tandis que Tchang Kaï-Shek déclara qu’il était l’équivalent d’une armée de 100 000 hommes.

 

 

 

Soldat dans l’armée du tsar

Vassili Kontantinovitch Blücher est né dans une famille paysanne du village de Barchinska dans la province de Iaroslav le 1er décembre 1889. Son nom si particulier lui vient de son aïeul serf à qui il fut donné durant la guerre de Crimée par son propriétaire en l’honneur du maréchal prussien Blücher.

 

Après avoir reçu une instruction primaire à l’école paroissiale, Blücher commence à travailler. Son père le conduit en 1904 à Saint-Pétersbourg où il devient garçon dans la boutique du marchand Klochkova puis ouvrier à l’usine de machines-outils Byrd. En 1906, il rentre finalement dans son village pour reprendre ses études. À l’automne 1909, il se rend à Moscou pour travailler dans un atelier de serrurerie puis comme mécanicien dans une usine de wagons à Mytichtchi. C’est là qu’il prend part à une grève en 1910 qui le fait condamner à trois ans de prison. Libéré, il trouve du travail aux ateliers de chemins de fer de la ligne Moscou-Kazan.

 

Avec le début de la Première Guerre mondiale, Blücher est incorporé au 56e bataillon de réserve puis rejoint le front en novembre 1914 au sein du 19e régiment d’infanterie de Kostroma. Soldat courageux, il devient sous-officier puis officier et reçoit la médaille de Saint-Georges. Il est grièvement blessé par une grande en janvier 1915 et passe plus d’un an en convalescence dans différents hôpitaux du pays. Finalement, en mars 1916, il est démobilisé et trouve du travail dans une usine de construction navale prés de Nijni-Novgorod puis dans une usine de mécanique à Kazan.

 

Vassili Blücher en 1915

Vassili Blücher en 1915

Héros de la guerre civile

En juin 1916, il rejoint le Parti bolchevik qui lui donne en mai 1917 l’ordre de réintégrer l’armée. Blücher intègre le 102e régiment de réserve où il est élu vice-président du soviet du régiment. En novembre 1917, au moment de la Révolution d’Octobre, il est membre du comité militaire révolutionnaire de Samara et participe à la prise de contrôle de la province. Il devient alors commissaire politique de la garnison de Samara.

 

Blücher participe à la formation de l’Armée rouge. À la fin de 1917, il est commissaire d’un détachement de Garde rouge envoyé à Tcheliabinsk pour participer à la lutte contre les cosaques d’Orenbourg commandés par l’ataman Doutov. Blücher agit dans la région de Tcheliabinsk entre janvier et mars 1918 et se voit également chargé de former les organes du nouveau pouvoir soviétique. En mars 1918 il est donc élu président du soviet de Tcheliabinsk et chef de l’état-major de la garde rouge.

 

La lutte contre les cosaques d'Orenbourg connaît des succès divers. L'ataman Doutov se retrouve dans l'Oural où il est pratiquement encerclé. Il parvient néanmoins à percer pour rejoindre la steppe Tourgaï tandis qu’au printemps débute un vaste soulèvement cosaques que les bolcheviks combattent en lançant des expéditions punitives contre les villages. Blücher participe à ses actions et acquiert une certaine notoriété en raison des mesures drastiques qu’il prend. Dans le même temps il rencontre des représentants cosaques et mène des négociations avec eux. En mai 1918, il dirige un détachement sous Orenbourg où la croissance graduelle des rébellions cosaques favorise en mai 1918 le soulèvement du corps tchécoslovaque contre les bolcheviks.

 

Blücher assoit sa réputation en 1918 quand il mène un raid de 150 km dans les arrières des Blancs. À la suite du soulèvement des cosaques d’Orenbourg, les bolcheviks qui tiennent la ville se retrouvent cernés. Les dirigeants de la Garde rouge décident à la fin juin de briser cet encerclement, une partie doit se diriger vers le Turkestan et une autre sous les ordres de Blücher et des cosaques rouges de Tomine et des frères Kashirine doit prendre la direction du nord afin de trouver du soutien dans leurs villages d’origine. Mais la majorité des villageois cosaques étant hostile aux bolcheviks, ces derniers ne peuvent rester dans leur territoire et doivent trouver refuge dans l’Oural industriel. Durant la marche, des groupes disparates sont réunis sous les ordres de Blücher qui se retrouve élu, le 2 août, commandant de l’unité des partisans du sud de l’Oural doit une force de 10 000 hommes. Il révèle alors ses dons d’organisateurs et de commandant ainsi que son savoir-faire manœuvrier. Régulièrement les hommes de Blücher affrontent les Blancs qu’ils parviennent à neutraliser et réussissent à franchir l’Oural et à rejoindre les lignes de la 3e armée rouge du front oriental, le 12 septembre après une marche de 54 jours. À la suite de cet exploit, Blücher devient, le 28 septembre, le premier récipiendaire de l’Ordre du Drapeau rouge.

Blücher en 1919

Blücher en 1919

Le 20 septembre 1918, Blücher se voit confier le commandement de la 4e division de l’Oural de l’Armée rouge qu’il commande jusqu’en novembre 1918 avant de prendre la tête de la 30e division d’infanterie. À la fin janvier 1919, il est nommé adjoint du commandant de la 3e armée du front oriental et organise la défense de Viatka face à l’offensive des troupes de l’amiral Koltchak. En avril 1919, il se voit confier la tache de former et de diriger la 51e division d’infanterie dans la région de Tioumen et du lac Baïkal. C’est à la tête de cette unité qu’il prend part à l’offensive soviétique à travers l’Oural contre les armées de Koltchak. Sa division s’empare ainsi de Tioumen le 6 août puis de Tobolsk. L’armée blanche est définitivement vaincue à l’automne 1919 et en mars 1920, fait prisonnier, l’amiral Koltchak est fusillé.

 

En août 1920, la division de Blücher est transféré dans le sud de la Russie pour lutter contre les troupes du Wrangel. Blücher défend ainsi la tête de pont de Kakhovka contre laquelle les Blancs utilisent des chars d’assaut britanniques. En octobre, une fois renforcée par des brigades de choc, sa division devient le fer de lance de l’offensive soviétique contre Wrangel en Crimée. Elle atteint Perekop puis le 9 novembre se lance à l’assaut des fortifications blanches qui défendent l’isthme, porte d’entrée de la Crimée. Le 11 novembre le front blanc s’effondre. Le 15, la division de Bulcher s’empare de Sébastopol puis de Yalta le lendemain. Malgré les lourdes pertes dans les rangs de sa division, Blücher reçoit alors un deuxième Ordre du Drapeau rouge puis le commandement en chef de la province d’Odessa.

 

Blücher est ensuite envoyé en Extrême-orient où la guerre civile n’est pas terminée. Là, il occupe le poste clef de ministre de la Guerre de la République d’Extrême-Orient, une entité territoriale créée spécialement afin d’éviter les affrontements directs entre les unités de l’Armée rouge et les troupes japonaises présentes dans la région. Sous la direction de Blücher se forme alors une armée révolutionnaire populaire de la République d’Extrême-Orient qui libère la région des dernières troupes blanches en 1922. Blücher commande ainsi les troupes lors de la bataille de Volochaevska près de Khabarovsk, les 10-12 février 1922, l’une des plus célèbres batailles menées par l’armée de la République d’Extrême-Orient. Cette bataille signe la victoire totale des Soviétiques contre les restes des armées blanches. Mais Blücher quitte l’Extrême-Orient en juillet avant la bataille de Spassk-Dalni en octobre qui met définitivement fin à la guerre civile.

Commandant durant la guerre civile

Commandant durant la guerre civile

Conseiller militaire en Chine

À la fin de la guerre civile, malgré son manque de formation militaire académique, Blücher appartient à l’élite militaire de la Russie soviétique. Il est nommé, en 1922, commandant du 1er corps d’infanterie, puis de la zone fortifiée de Petrograd. En 1924, il est détaché auprès du conseil militaire révolutionnaire de l’URSS pour accomplir des missions délicates.

 

À ce titre il est envoyé de 1924 à 1927 en Chine comme conseiller militaire du gouvernement nationaliste de Sun Yat-Sen, sous le pseudonyme de Galen. Durant cette période, il dirige un groupe de conseillers militaires et politiques qui atteint la centaine de personnes au milieu de 1927 et supervise la réforme de l’armée du Kuomintang. Il organise en 1926-1927, l’expédition du Nord, menée par l’armée révolutionnaire nationale chinoise et qui aboutit à la réunification du pays. Par son talent, Blücher gagne le respect des autorités chinoises et en 1927, quand les nationalistes se retournent contre les communistes, Tchang Kaï-Chek le laisse s’échapper, lui évitant le sort funeste que connaissent certains conseillers soviétiques. Plus tard dans les années 1930, alors qu’il lutte contre le Japon, le chef du Kuomintang n’hésitera pas à déclarer que Blücher vaut à lui seul une armée de 100 000 hommes. Son talent est aussi reconnu par les militaires soviétiques. Le futur maréchal Joukov, qui l’a connu au milieu des années 1920 dira : « J’étais fasciné par la sincérité de cet homme. Combattant intrépide contre les ennemis de la République soviétique, héros légendaire, Blücher était pour beaucoup un idéal. Franchement, j’ai toujours voulu être comme ce grand bolchevik, un ami merveilleux et un commandant de talent. »

Portrait de Blücher

Portrait de Blücher

Commandant de l’armée d’Extrême-Orient

À son retour en URSS, après un commandement en Ukraine, Blücher est nommé en 1929 à la tête du district militaire d’Extrême-Orient, un secteur vital pour la défense soviétique. À peine arrivé à son nouveau poste, il doit lutter contre les seigneurs de la guerre chinois alliés à des Russes blancs pour le contrôle du chemin de fer de l’Est chinois. Victorieux, il signe en décembre 1929 un accord avec le seigneur de la guerre Zhang Zueliang pour résoudre les conflits autours du chemin de fer avant qu’un accord de paix soit signé à Khabarovsk en décembre 1930.

 

En 1930, Blücher est élu membre du comité exécutif central du soviet de l’URSS. Il devient également député au 1er soviet suprême de l’URSS et membre suppléant du comité central du PCUS en 1934 et 1937. Il symbolise la puissance soviétique en Extrême-Orient, étendant son pouvoir au-delà de la sphère militaire pour s’occuper d’économie, participant à la création de kolkhozes ou à l'approvisionnement des villes. Blücher devient alors une légende dans l’Armée rouge. Dans les années 1930 des milliers de parents de conscrits lui écrivent pour lui demander d’incorporer leurs enfants dans l'armée d’Extrême-Orient. Il est le premier récipiendaire de l’Ordre du Drapeau rouge et de l’Ordre de l’Étoile rouge. Il reçoit ainsi deux Ordres de Lénine et cinq Ordres du Drapeau rouge. En 1935 il reçoit le grade le plus prestigieux celui de maréchal de l’Union soviétique.

Les cinq premiers maréchaux de l'URSS en 1935 (Blücher, debout à droite)

Les cinq premiers maréchaux de l'URSS en 1935 (Blücher, debout à droite)

Blücher s’intéresse au développement de la pensée militaire, il cherche à améliorer la formation des commandants. Durant les années 1930, grâce à la direction du renseignement de l’Armée rouge, il se procure des revues militaires étrangères qu’il étudie.

 

Au milieu des années 1930 les tensions avec le Japon s’accroissent suite à l’invasion de la Mandchourie par l’armée nippone. Finalement, en juillet-août 1938, Blücher montre à nouveau ses capacités lors de la bataille du lac Khasan en écrasant les Japonais, préservant ainsi l’intégrité de la frontière soviétique. Il est rappelé à l’automne à Moscou où il arrive le 22 octobre 1938 alors que la Grande Terreur bat son plein.

L'Extrême-Orient soviétique dans les années 1930

L'Extrême-Orient soviétique dans les années 1930

Victime de Staline

Blücher participe activement aux purges qui frappent le commandement de l’Armée rouge en Extrême-Orient. En juin 1937, il est également membre du Tribunal militaire qui condamne à mort le maréchal Toukhatchevsky ouvrant la voie à l’épuration de l’armée. À l’automne 1938, quand il arrive à Moscou sa position est précaire. La victoire au lac Khasan éloigne la menace japonaise et rend donc la présence de Blücher sur ce front moins utile. Surtout, Staline tient alors un prétexte pour l’éliminer. S’il lui reproche d’abord les pertes subies au lac Khasan où il a fallu 10 jours de combats pour l’emporter, son sort a été scellé en juin quand le chef du NKVD en Extrême-Orient, Guenrikh Liouchkov, a fait défection et livrait des documents militaires aux Japonais.

Blücher à Khabarovsk en 1937

Blücher à Khabarovsk en 1937

Blücher est arrêté par le NKVD le 24 octobre 1938, accusé d’espionnage au profit du Japon. Refusant d’avouer, il est torturé pendant 18 jours d’affilée lors d’une instruction où s’implique personnellement Beria. Il meurt sous la torture sans n’avoir rien confessé le 9 novembre 1938. Son corps est incinéré tandis que le NKVD fabrique un faux procès-verbal d’aveux dans lequel Blücher s’accuse d’être le chef d’une organisation anti-soviétique et d’un complot militaire.

 

Sa famille n’est pas épargnée par la répression. Sa fille adoptive est fusillée le 10 mars 1939, sa seconde épouse le 14 mars 1939, sa troisième épouse est condamnée à 8 ans de camps. Le frère de Blücher, Pavel, officier dans l’aviation, est fusillé le 26 février 1939. Le maréchal Blücher est officiellement réhabilité à titre posthume le 12 mars 1956.

Fresque en l'honneur de Blücher

Fresque en l'honneur de Blücher

Bibliographie

-Блюхер В.К. Статьи и речи, [ Blücher V.K, Articles et discours] Воениздат, 1963.

-Великанов Н.Т. Блюхер, [Velikanov N., Blücher] Молодая гвардия, 2010.

-Картунова А.И.В.К, В.К. Блюхер в Китае 1924-1927 гг. Новые документы главного военного советника, [Kartounova A, Blücher en Chine 1924-1927. Nouveaux documents du chef des conseillers militaires] Наталис, 2003.

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27 août 2015 4 27 /08 /août /2015 11:32

Benjamin Isitt, De Victoria à Vladivostok. L’expédition sibérienne du Canada, 1917-1919, Presses de l’Université Laval, 2012.

Les Canadiens en Sibérie

L’histoire de la guerre civile russe est l’un des parents pauvres de l’historiographie et de l’édition francophone. C’est donc avec une certaine impatience que nous nous sommes plongés dans la livre de Benjamin Isitt, historien canadien, qui raconte et analyse l’intervention militaire canadienne en Sibérie en 1918-1919. Et la surprise fut bonne.

 

Loin de se contenter d’une histoire militaire classique, l’auteur montre les liens étroits qui existent entre l’agitation sociale au Canada et le déroulement de l’expédition sibérienne et la complexité des rapports entre le monde ouvrier et les militaires en période de guerre. Pour Isitt, les pratiques radicales du mouvement ouvrier canadien favorisent la mutinerie de conscrits québécois en instance de départ pour la Russie. Si cette mutinerie est rapidement réprimée, elle contraint néanmoins les militaires à ne conduire aucune activité opérationnelle en Sibérie et les dirigeants à décider le retour rapide du corps expéditionnaire.

 

L’ouvrage d’Isitt traite également des rapports entre le Canada, dominion britannique, et Londres et de sa volonté de mener une politique étrangère conforme à ses intérêts propres. Il n’oublie pas de décrire les évolutions politiques qui touchent l’Extrême-Orient russe, les missions dévolues au corps expéditionnaire canadien, les relations de ce dernier avec les autres corps expéditionnaires, notamment américains et japonais.

 

Voici donc un livre passionnant, bien documentée et illustrée, indispensable à la fois pour appréhender l’influence des interventions étrangères en Russie mais également les répercussions de ces interventions dans les pays alliés. Espérons qu’une étude traitant de l’intervention française voit le jour rapidement.

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe. Canada
8 janvier 2015 4 08 /01 /janvier /2015 07:26
1919, Makhno contre Denikine

Sur le blog "L'autre coté de la colline" nous publions ce mois-ci un article sur les combats entre les forces blanches du général Denikine et l'armée insurrectionnelle de l'anarchiste Nestor Makhno en Ukraine en 1919.

Cet article, qui nous donne l'occasion de retracer la geste militaire de Makhno dans le guerre civile russe, est consultable ici.

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20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 07:01
Légionnaires en Sibérie

Légionnaires en Sibérie

Les Tchécoslovaques face à Koltchak.

Le général Radola Gajda, commandant de la 2e division tchécoslovaque est, contrairement à Sirovy, favorable à l'engagement des légionnaires auprès de Koltchak. Au début de 1919, l'amiral constitue 3 armées, l'armée de Sibérie, l'armée de l'Ouest et l'armée d'Orenbourg. Ces armées, adossés à l'Oural, doivent prendre l'offensive en direction de Samara, puis marcher vers l'ouest pour prendre Nijni-Novgorod et Moscou. Il offre alors le commandement de l'armée de Sibérie à Gajda qui a rallié à lui certains légionnaires.

 

Début mars 1919, les troupes blanches se déploient. L'armée de Sibérie commandée par Gajda se trouve au nord entre Perm et Glasov. L'armée de l'Ouest du général Hanschin se masse devant Oufa et l'armée de l'Ouest de l'hetman Doutov se trouve entre Orsk et Orenbuurg. Rapidement des divergences apparaissent entre les généraux russes et Gayda. Si les Russes veulent marcher directement sur l'ouest, Gayda veut quand à lui prendre la direction du nord dans le but d'opérer une jonction avec les Alliés qui se trouvent à Arkhangelsk.

 

Quand l'offensive se déclenche, les 3 armées prennent des axes de marche différents. L'armée de Sibérie de Gajda se dirige vers le nord-ouest en direction d'Arkhangelsk, l'armée de l'Ouest marche en direction de Bogoulma tandis que celle d'Orenbourg fait un mouvement tournant vers Bousoulouk. L'Armée rouge est d'abord surprise par la vigueur de l'attaque. Elle recule donc de prés de 400 km mais, vers la mi-avril 1919, une brèche dangereuse s'ouvre entre l'armée de Sibérie et l'armée de l'Ouest. Les Rouges s'y engouffrent, provoquant la panique chez les Blancs qui, craignant d'être tournée, battent en retraite. Les Russes accusent alors les Tchécoslovaques d'avoir décroché trop tôt, provoquant la catastrophe. Gajda est finalement destitué.

 

La bataille de l'Oural tourne au désastre pour les Blancs. Perm est perdu ainsi que la flottille fluviale de la Volga. Les Blancs refluent et parviennent à se regrouper, à la mi-juin, sur la ligne Iekaterinbourg-Tcheliabinsk-Troïtsk. A Tcheliabinsk, des combats acharnés ont lieu, la ville changeant plusieurs fois de mains, avant de tomber sous le contrôle des Rouges.

 

Toukhatchevsky fait alors marcher la 5e Armée rouge en direction du fleuve Tobol et ses avant-gardes atteignent Tobolsk et Ichim. Mais la 3e armée blanche, commandé par Sakharov, qui regroupe les éléments subsistant de l'armée de Sibérie et de l'Ouest, résistent avec acharnement. L'armée d'Orenbourg a été quand à elle refoulé vers le sud-est en direction de la mer d'Aral. Finalement, à court de munitions, les Rouges se replient derrière le fleuve Tobol.

 

Fin octobre la 5e armée rouge, dont les effectifs ont été doublé, reprend l'offensive. Elle franchit le Tobol et bouscule les Blancs. Le 3 novembre, elle prend Tobolsk et le 15 c'est Omsk qui tombe. La retraite de l'armée blanche tourne vite à la catastrophe et s'accompagne d'un exode massif de population dans une situation sanitaire déplorable. Dans cette débâcle, seule la légion tchécoslovaque garde une certaine cohérence. Les légionnaires essayent, dans cette cohue, de s'ouvrir un chemin vers la mer. Cette progression est marquée par quelques massacres qui touchent des prisonniers de guerre allemands, autrichiens et hongrois rencontrés sur la route.

 

L'effondrement du front de l'Oural a sonné définitivement la fin de la collaboration militaire entre Tchécoslovaques et Russes. Masaryk envoie alors une délégation pour notifier à Koltchak la neutralité des Tchécoslovaques. Janin et Sirovy quand à eux accélèrent les mesures organiser leur rapatriement. Pour cela les convois des légionnaires obtiennent la priorité absolue sur le Transsibérien.

Train blindé tchécoslovaque

Train blindé tchécoslovaque

La fin de l'odyssée des légionnaires en Russie.

Le régime de Koltchak est devenu largement impopulaire. Son programme politique est maigre et ne répond pas aux demandes de la population, notamment en matière de démocratie. Les partis politiques sont interdits tandis que certains atamans, comme Semenov et Kalmykov, se livrent à des atrocités en Sibérie. Sur le plan politique il échoue donc à former une solide unité entre les différents mouvements anti-bolcheviks. Ainsi quand les SR se révoltent, ils sont matés par les cosaques ce qui les pousse eux et leur armée populaire, après des négociations, à rejoindre les Rouges.

 

Au niveau militaire, les actions de Koltchak manquent de coordination avec celles de Denikine dans le sud de la Russie et celles de Ioudenitch au nord-ouest. Surtout, l'amiral est incapable de convaincre les Alliés d'intervenir avec des troupes. Les Américains n'apprécient pas Koltchak et vont même créer une commission d'enquête sur les crimes commis par les Blancs. Le général Graves qui commande les troupes américaines en Russie considère lui aussi Koltchak comme un monarchiste et un réactionnaire qui tend à la dictature. Cette opinion est même partagée par le président Wilson qui, s'il accepte d'approvisionner les Blancs en armes et munitions, refuse de reconnaître le gouvernement Koltchak.

 

L'amiral ne peut s'appuyer sur les petits contingents français et italiens en Sibérie et britanniques dans le nord-ouest. Il ne peut compter non plus sur le soutien des Japonais qui veulent faire main basse sur la Sibérie orientale. Les chances de maintenir son pouvoir et les bases d'une résistance antibolchevique s'écroulent définitivement avec la perte de Omsk.

 

Dans les villes de Sibérie des forces de gauche, notamment SR, se soulèvent et prennent le pouvoir, notamment à Irkoutsk, bloquant la retraite vers Vladivostok et coupant en deux les forces de Koltchak, celle de l'hetman Semionov se trouvant au-delà d'Irkoutsk entre Tchita et Kharbine.

 

L'amiral est pressé par les Rouges qui avancent à l'ouest. Koltchak demande alors l'aide de Janin qui répond qu'il ne peut rien faire et lui demande de se replier. Le 13 novembre, Koltchak se sépare de son armée et prend le train pour Krasnoïarsk avec son état-major et sa garde personnelle abandonnant Omsk pour rejoindre son gouvernement à Irkoutsk. A l'annonce de ce départ l'armée blanche se replie précipitamment ne laissant en arrière-garde qu'une division polonaise et un régiment serbe qui sont rapidement capturés. Les Tchécoslovaques se retrouvent alors à l'arrière-garde au contact direct avec les Rouges. Ils envoient des parlementaires au commandement de la 5e Armée rouge pour lui demander de les laisser partir. Les Rouges acceptent mais Frounze pose comme condition que les Tchécoslovaques soient désarmés et faits prisonniers pour être ensuite évacués par l'ouest. Les légionnaires refusent alors que l'artillerie rouge les prend déjà pour cible. Ils se retrouvent alors pris en étau entre la 5e armée rouge et les SR de la zone d'Irkoutsk.

 

Le trafic est bloqué sur le Transsibérien créant un embouteillage monstre à Taïga. Les légionnaires qui ont réquisitionné de nombreux trains pour transporter l'armement et le ravitaillement qu'ils ont accaparés sont en partie responsable de cette situation. Koltchak, dont le train avance lentement et qui accuse les Tchécoslovaques d'en être responsable, ordonne alors, en représailles, d'arrêter leurs convois par tous les moyens et demande à Semionov de contrôler les bagages légionnaires. Le conflit entre Koltchak et les Tchécoslovaques est ouvert. Le 9 janvier, le 4e régiment d'infanterie tchécoslovaque lance une opération contre Semonov dans la région du Baïkal. Après 4 heures de combat les troupes blanches sont défaites. Un armistice est signé sous l'égide des Japonais le 12 janvier.

 

Le 20 décembre, Koltchak atteint Nijneoudinsk et apprend que des SR et des mencheviks ont pris le pouvoir à Irkoutsk en formant un Centre politique. Janin envoie alors un télégramme à l'amiral lui demandant de ne pas se rendre immédiatement à Irkoutsk. Quand ce dernier apprend finalement que son gouvernement à négocier une reddition, il démissionne le 6 janvier au profit du général Denikine.

 

Les Tchécoslovaques n'ont jusqu'alors rien fait pour stopper le convoi de Koltchak mais à Krasnoïarsk le train est tronçonné et la garde de Koltchak se voit refuser de poursuivre sa route. A Nijneoudinsk, le convoi est finalement arrêté par les légionnaires et cerné par des soldats en armes. Koltchak fait alors prévenir Janin qui s'est réfugié à Vladivostok. Le commandant allié lui répond de se mettre sous la protection des Tchécoslovaques. Rassuré, Koltchak accepte, et les derniers soldats blancs quittent son wagon pour laisser la place aux légionnaires. Près de Tcheremchovo, des troupes communistes formées par les ouvriers des mines de charbon attaquent le convoi. Les Tchécoslovaques acceptent alors que des Gardes rouges participent à la garde du train qui arrive à Irkoutsk où il est mis sur une voie de garage. Le 15 janvier, les légionnaires annoncent à Koltchak qu'il va être remis au Centre politique d'Irkoutsk. L'ordre vient de Janin et de Sirovy. Dans la soirée les miliciens socialistes viennent arrêter Koltchak qui est transféré à la prison municipale. Au même moment des délégations tchécoslovaques et bolcheviques se réunissent dans la gare de Kuitin pour conclure un accord concernant le passage des divisions tchécoslovaques à travers la région d'Irkoutsk.

 

Le 20 janvier, le Centre politique abandonne le pouvoir à Irkoutsk à un comité révolutionnaire bolchevik alors que la 5e armée rouge approche de la ville. A la nouvelle de l'arrestation de Koltchak, de Tchita, Semionov envoie un commando sous les ordres du général Skipetrov sur Irkoutsk. A Krasnoïarsk et Kansk les restes de l'armée blanche sous les ordres de Kappel marchent aussi sur Irkoutsk pour délivrer leur chef. Le 7 février les avants gardes, sous les ordres de Wojciechowski, sont à Inokentjevsk à quelques km au nord-ouest d'Irkoutsk mais ce dernier reçoit un message de la 2e division tchécoslovaque qui lui intime l'ordre de ne plus avancer sinon les légionnaires se battront au coté des rouges. A l'est les Tchécoslovaques ont arrêté Skipetrov et désarmé ses hommes. Mais dans les premières heures de ce 7 février, Koltchak a été passé par les armes. Le même jour les légionnaires trouvent un accord avec les Soviétiques pour évacuer leur troupes vers Vladivostol, évacuation qui commence le lendemain ne laissant en arrière-garde que le 7e régiment d'infanterie.

 

Pour les Tchécoslovaques le dernier obstacle au rapatriement est levé. Fin février, la 2e division quitte Irkoutsk. Les légionnaires traversent la Mandchourie, font halte à Kharbine et arrivent en mars à Vladivostok où les attendent 29 navires. Ce sont plus de 67 000 personnes qui sont évacuées dont 53 000 soldats et 3 000 officiers. Une partie passe par l'océan Indien, Suez, Trieste et l'Autriche et une autre traverse le Pacifique puis les États-Unis. Ils arrivent en Tchécoslovaquie auréolé fêté comme des héros tandis que le dernier légionnaire quitte la Russie le 2 septembre 1920.

Le général Syrovy, commandant de la légion tchécoslovaque en Russie

Le général Syrovy, commandant de la légion tchécoslovaque en Russie

Près de 4 000 légionnaires sont morts en Russie. L'odyssée de la légion tchécoslovaque s'inscrit d'abord dans l'histoire de la Tchécoslovaquie et plus particulièrement de son accession à l'indépendance. Les combats que les légionnaires ont menés en Russie ont en effet servi les efforts de Masaryk et du Conseil national tchécoslovaque dans leurs négociations avec les Alliés qui aboutissent à la création de la République tchécoslovaque fin 1918.

 

Dans l'évolution de la guerre civile russe, le rôle des Tchécoslovaques est également essentiel. Leur révolte en mai 1918 coute en effet aux bolcheviks le contrôle des régions à l'est de l'Oural tandis que leurs succès militaires offrent le temps aux forces antibolcheviques de Sibérie de s'organiser et de former un nouveau front de la guerre civile sous les ordres de l'amiral Koltchak.

 

Pourtant à la fin de la guerre civile, certains blancs accusent les Tchécoslovaques de trahison, notamment pour avoir livré Koltchak à ses adversaires. Mais c'est oublier que les légionnaires ne furent en Russie que les instruments de la politique des Alliés, une politique timorée, contradictoire et ambiguë qui tourna finalement au désastre.

 

Bibliographie:

Bullock, David: The Czech Legion 1914–20, Osprey Publishers, 2008.

Joan Mc Guire Mohr, The Czech and Slovak Legion in Siberia from 1917 to 1922, Mc Farland, 2012.

Footman, David, Civil War in Russia, 1961.  

Légionnaires tchécoslovaques

Légionnaires tchécoslovaques

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe.
18 novembre 2014 2 18 /11 /novembre /2014 07:57

La révolte des Tchécoslovaques.

Le 14 mai 1918 à la gare de Tcheliabinsk un convoi de légionnaires tchécoslovaques croise un convoi de prisonniers de guerre austro-hongrois. Une querelle survient, un Hongrois, qui a mortellement blessé un légionnaire, est lynché par les Tchécoslovaques. Les Gardes rouges interviennent et arrêtent les Tchécoslovaques impliqués mais ceux-ci sont libérés de force par leurs camarades qui en profitent pour reprendre les armes qu'ils ont précédemment rendues. La légion tchécoslovaque entre en révolte. Une révolte qui n'est pas politique mais répond à de graves inquiétudes. Les Tchécoslovaques réalisent en effet que sur les 450 000 prisonniers de guerre se trouvant en Russie, un grand nombre collabore avec les bolcheviks tandis que le Transsibérien est la victime de raids menés par des rebelles armés. Dans ces conditions si les Tchécoslovaques continuent à être désarmé, ils deviendront vulnérable et il sera facile aux bolcheviks de les bloquer pour les remettre ensuite aux autorités austro-hongroises.

 

Après l'incident de Tcheliabinsk, Trotski ordonne le désarmement des Tchécoslovaques ajoutant que ceux qui refusent doivent être abattu. Simon Aralov, chef de la section des opérations aux Commissariat du peuple à la guerre, considérant les Tchécoslovaques comme un encombrant héritage de l'armée tsariste, donne alors les instructions nécessaires pour faire appliquer les décisions de Trotski.

 

Les Tchécoslovaques se retrouvent alors éparpillés de Penza à Vladivostok, le long d'une voie ferrée coupée en de nombreux endroits. Du 21 au 23 mai 1918 un congrès des légionnaires se tient à Tcheliabinsk qui suspend temporairement l'autorité du quartier général du corps au profit d'un collège élu qui décide que les légionnaires doivent rejoindre Vladivostok en armes. Quand, obéissant aux ordres de Trotski, les Rouges essayent de stopper et de désarmer les Tchécoslovaques des affrontements armés éclatent.

 

Le plan qu'établissent les Tchécoslovaques consiste alors à établir une liaison entre les différentes gares où les légionnaires sont bloqués afin de sécuriser la voie ferrée. Une fois le Transsibérien sous contrôle, les unités pourront prendre le chemin de Vladivostok pour embarquer sur des navires alliés à destination de la France. Quand les premiers légionnaires parviennent finalement à Vladivostok, ils y trouvent les Alliés mais pas de navires. Ces derniers souhaitent en effet que les Tchécoslovaques restent en Russie pour reconstituer un front oriental. Cela doit permettre selon eux d'éviter l'infiltration allemande en Sibérie et surtout d'empêcher les Allemands de transférer des troupes de Russie vers le front occidental. Les Tchécoslovaques acceptent et reprennent position sur l'Oural. Ils sont alors conscients qu'en fixant des troupes allemandes en Russie ils soulagent la pression à l'Ouest où les Américains arrivent et cette contribution ne peut que servir les desseins du Conseil national tchécoslovaque. En chemin, alors qu'ils manquent de réserves et de renforts, ils parviennent à recruter 15 000 prisonniers de guerre tchécoslovaques.

 

Encouragé par l'annonce que deux armées alliées arrivent en renfort, une armée française venant de Vologda et une armée japonaise venant de Vladivostok, les forces russes et tchécoslovaques repartent en avant. La légion est alors divisée en 3 groupes, le groupe de Penza commandé par Cecek, celui de Tcheliabinsk sous les ordres de Syrovy et le groupe de l'Est dirigé par Dieterichs. Le 26 mai, les légionnaires s'emparent de Tcheliabinsk et de Novosibirsk et dans les semaines suivantes de Mariinsk, Kansk, Penza, Syzran, Petropavlovsk, Tomsk et Kurgan. Pour assurer les liaisons entre les différents groupes, celui de Tcheliabinsk s'empare de Omsk le 10 juin et rejoint le groupe de l'Est. Le groupe de Penza marche vers l'est et s'empare d'Oufa et de Samara où se sont installés les représentants des partis modérés russes. A l'Est les légionnaires prennent le contrôle de Vladivostok.

 

Pour parvenir à vaincre des adversaires, le plus souvent bien supérieur en nombre, les Tchécoslovaques développent une tactique originale. Des petits groupes de combattants s'infiltrent dans les lignes ennemies pour provoquer le panique puis le gros des troupes lance une attaque surprise cherchant à déborder l'adversaire. L'utilisation de la cavalerie et des trains blindés leur fournit en outre un haut degré de mobilité permettant des attaques rapides sur des forces soviétiques statiques, le plus souvent enterrés dans des tranchées. Les Tchécoslovaques possèdent également une petite force aérienne mais aussi navale qui s'illustre sur le lac Baïkal.

 

Le 7 aout, les légionnaires prennent Kazan où se trouvent le trésor des tsars. Le butin, représentant plusieurs milliards de roubles, est chargé sur 5 wagons qui prennent la direction de l'est. Le général Cecek prend alors le commandement du front de la Volga. Les succès tchécoslovaques ont pour effet de galvaniser les Russes antibolcheviks alors que Kuzneck, Kazan et Irkoutsk tombent également et que des détachements prennent Iekaterinbourg, provoquant l'assassinat de la famille impériale. A la fin aout 1918 les Tchécoslovaques ont ainsi réussi à prendre le contrôle de l'ensemble du Transsibérien de Penza à Vladivostok.

 

Les forces blanches s'organisent, se renforcent et deviennent à même d'affronter les Rouges. Mais leur principale faiblesse réside dans le fait qu'elles ne sont ni coordonnés, ni homogènes. Alors que Samara, où se trouve le quartier général tchécoslovaque, est gouverné par les SR, à Ouralsk et Orenbourg ce sont les cosaques qui dominent. A Omsk se forme un gouvernement autonome sibérien tandis que Tchita est sous la coupe de l'hetman Semionov. Pour remédier à cette anarchie, SR, mencheviks et partis nationaux se réunissent en congrès à Oufa en septembre 1918 et élisent un Directoire de 5 membres où se trouvent 3 proches de Kerenski. Ce Directoire nomme un gouvernement d'Union nationale où l'amiral Alexandre Koltchak est nommé ministre de la Guerre.

Le Transsibérien

Le Transsibérien

Naissance d'un nouveau front de la guerre civile.

Malgré leur rapide succès le moral des Tchécoslovaques se détériore rapidement. Ils attendent en effet d'être relevé ou de recevoir des renforts des Alliés mais ces derniers n'envoient en Russie que de maigres contingents, qui ont plus souvent une valeur symbolique que militaire. Seule les Japonais déploient des troupes en nombre mais uniquement dans l'espoir de former des protectorats en Mandchourie, en Mongolie et en Sibérie orientale. Ils n'ont donc aucun intérêt à voir se reconstituer une Russie forte et unie et les 70 000 soldats japonais, n'ayant donc pas l'intention de soutenir les Tchécoslovaques, ne s'aventurent à l'ouest pas plus loin que Irkoutsk.

 

La mission de constituer un nouveau front oriental repose donc sur les épaules des Tchécoslovaques. Ils reçoivent néanmoins des Alliés 200 canons, 1 300 mitrailleuses, 140 000 fusils, 25 avions et 240 000 obus. Pour tenir le front l'ensemble des unités tchécoslovaques du Baïkal à Vladivostok est donc mobilisé. Ils ne reçoivent l'aide que des petits bataillons serbes et roumains et de détachements lettons.

 

Pendant que les Blancs s'organisent avec peine, Trotski met sur pied l'Armée rouge qui fait son apparition sur le front oriental à l'été 1918 et s'empare de Kazan le 9 septembre. Sans renforts japonais ou français et face à un ennemi 10 fois supérieur, le front russo-tchécoslovaque se disloque rapidement. Simbirsk, Volsk et Syrzan tombent. Le 15 octobre, les Tchèques abandonnent la ligne de défense Samara-Oufa.

 

Les légionnaires commencent aussi à échapper au contrôle des officiers et se livrent aux pillages des villages qu'ils traversent. La fin de la guerre le 11 novembre 1918 enlève définitivement aux légionnaires toute raison de se battre en Russie tandis que l'annonce de l'indépendance de la Tchécoslovaquie exacerbe leur désir de rentrer chez eux. Désormais chaque fois qu'ils entrent en contact avec les Rouges, les Tchécoslovaques décrochent vers l'est et s'emparent pour cela de plusieurs centaines de locomotives et de milliers de wagons pour se frayer un chemin vers Vladivostok. Mais le Transsibérien est une ligne à voie unique où les trains ne peuvent se croiser qu'à quelques embranchements, les trains tchécoslovaques provoquent des embouteillages et empêchent l'arrivée de munitions et de renforts pour les forces blanches.

 

A Omsk où il a installé son quartier général, l'amiral Koltchak s'inquiète de cette situation. Les Rouges ne cessent en effet de progresser à l'ouest tandis que des agitateurs communistes apparaissent dans la région d'Irkoutsk sur les arrières blancs. Le trafic ferroviaire est quand à lui paralysé par les Tchécoslovaques tandis que le Directoire contrecarre le plus souvent les décisions de l'amiral. Dans l'espoir de mettre fin à cette décomposition, ce dernier organise, le 18 novembre 1918, un coup d'État. Il fait arrêter les membres du Directoire, dissout l'Assemblée et se fait nommer Régent et Gouvernant suprême de toute la Russie. Les Tchécoslovaques craignant alors que Koltchak ne veuille les incorporer de force dans l'armée blanche, des régiments se préparent à marcher sur Omsk pour le renverser. Koltchak qui ne souhaite pas combattre les légionnaires, ni avoir de complications avec les Alliés convoque alors le général Sirovy qui lui répond que les Tchécoslovaques resteront neutres dans la guerre civile.

 

A l'annonce du coup d'État de Koltchak, le général Janin et le général tchèque Stefanik se rendent à Omsk. Stefanik, après avoir essayé difficilement de rétablir l'ordre dans la légion, est contraint de rentrer en Tchécoslovaquie. Il reste alors à Janin, qui manque d'envergure, à maitriser une situation qui le dépasse largement. Finalement en janvier 1919 le commandant des forces alliées en Russie, retire les Tchécoslovaques du front, où ils sont remplacés par des unités russes blanches et leur donne comme mission de garder le ligne du Transsibérien de Novosibirsk à Mysovaïa près du Baïkal pour permettre de sécuriser l'approvisionnement des forces blanches en matériel allié. Cette mission, loin du front, s'avère néanmoins de plus en plus difficile alors que le nombre de groupes de partisans rouges ne cesse d'augmenter. Surtout les légionnaires sont utilisés contre les populations locales et servent à réprimer les insurrections contre le gouvernement blanc, ce qui ne permet pas de relever leur moral. Cette fonction policière ne fait donc qu'aggraver l'animosité contre Koltchak d'autant que la majorité des légionnaires sont des partisans de la démocratie et se montrent très méfiants envers la dictature de Koltchak, jugé monarchiste et réactionnaire.

Légionnaires tchécoslovaques

Légionnaires tchécoslovaques

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe.
14 novembre 2014 5 14 /11 /novembre /2014 07:52

Le 11 novembre 1918, si les armes se taisent sur le front occidental, à l'est de l'Europe, la guerre civile ravage la Russie. L'historiographie a généralement tendance à dissocier les deux conflits comme si le second n'était pas la conséquence et le prolongement de la Grande Guerre. L'odyssée des légionnaires tchécoslovaques en Russie illustre parfaitement ce constat. Cette armée d'un État qui n'existe pas avant la fin 1918, formée pour combattre les Empires centraux au sein de l'armée tsariste, joue en effet un rôle central dans la guerre civile russe.

 

La révolte des légionnaires en juillet 1918 est la première menace militaire sérieuse que doivent affronter les bolcheviks. Elle cristallise et favorise en outre l'organisation du mouvement blanc en Sibérie. Les légionnaires deviennent alors les instruments de la politique des Alliés en Russie, une politique timorée et ambiguë qui tourne rapidement au désastre.

 

 

La naissance de la légion tchécoslovaque.

Les Tchèques et les Slovaques vivent au sein de l'Empire des Habsbourg depuis le 16e siècle. Mais depuis le compromis de 1867 qui donne naissance à l'Autriche-Hongrie, ils se sentent de plus en plus mal à l'aise dans l'Empire, coincés entre la montée des sentiments pan-allemands en Autriche et la domination magyare en Hongrie.

 

En aout 1914, quand la guerre mondiale embrase l'Europe, tous les hommes de 20 à 45 ans de l'Empire d'Autriche-Hongrie sont mobilisés. Cherchant à affaiblir son adversaire en jouant sur les conflits de nationalités, la Russie, dés le 3 aout 1914 par la voix du grand-duc Nicolas, lance un appel aux peuples slaves de l'Autriche-Hongrie afin qu'ils se soulèvent contre l'oppresseur. Mais cet appel à la révolte n'est pas entendu et les Tchèques et les Slovaques demeurent loyaux à l'empereur François-Joseph. La police autrichienne a néanmoins pris la précaution d'arrêter les nationalistes et d'interdire leurs journaux tandis que la plupart des régiments tchèques sont envoyés sur le front oriental.

 

Dans les pays de la Triple-Entente, en France, en Serbie mais surtout en Russie, les Tchèques et les Slovaques ne font pas preuve de la même loyauté envers l'Empire. Dans ces pays, qui sont devenus des refuges pour les nationalistes venant de la Double-Monarchie, beaucoup s'engagent individuellement dans les différentes armées alliées avant de former des unités autonomes de volontaires en France, en Italie et en Russie.

 

Dans l'Empire tsariste vivent quelques dizaines de milliers de Tchèques et de Slovaques. La grande majorité sont des paysans qui vivent en Volhynie et qui possèdent donc la nationalité russe. Les autres sont des enseignants, des commerçants, des industriels, des ouvriers de nationalité austro-hongroise émigrés en Russie. Quand la guerre éclate, ces expatriés organisent des manifestations de soutien à la Russie et demandent à rejoindre l'armée tsariste. Pour les organiser les autorités forment dès le 20 aout 1914 un bataillon de volontaires tchécoslovaques, la Druzina, qui rejoint la 3e armée impériale. Les effectifs sont modestes et les 720 hommes qui composent la Druzina appartiennent pour la plupart à la communauté tchèque de Volhynie.

 

En mars 1915, les Tchécoslovaques de Petrograd et Moscou fondent une Union des Tchèques et des Slovaques de Russie qui demande la formation d'une armée tchécoslovaque autonome. Le 13 janvier 1916, la Druzina devient un régiment de chasseurs mais face à l'afflux de volontaires il se transforme rapidement en une brigade. Les Russes restent cependant méfiants envers ces volontaires qui ne sont en définitive que des traitres à leur pays et décident donc que le commandement de la brigade restera russe et qu'elle sera tenue à l'écart des secteurs névralgiques.

 

A la même période au sein de l'armée austro-hongroise les désertions de Tchécoslovaques se multiplient. Des bataillons et des régiments entiers changent de camps comme le 28e régiment de Prague le 3 avril 1915. Rapidement plus de 25 000 Tchèques se trouvent dans les camps de prisonniers russes. Le 21 avril 1916 le tsar accepte que ces prisonniers soient intégrés au sein de la brigade tchécoslovaque. Mais par la suite les autorités tsaristes ne tiennent pas cette promesse.

Affiche de propagande pour les volontaire tchécoslovaques

Affiche de propagande pour les volontaire tchécoslovaques

Les Tchécoslovaques au service de la jeune démocratie russe.

Après la Révolution de février 1917, les Tchécoslovaques soutiennent le gouvernement provisoire, surtout que ce dernier accepte le 16 avril de libérer les prisonniers de guerre tchécoslovaques et même de former une armée tchécoslovaque en Russie.

 

Lors de l'offensive Kerenski en juin 1917, la brigade Druzina est engagé dans le secteur de Zborov. Les 3 500 Tchécoslovaques partent à l'assaut le 18 juin et bousculent les positions ennemies. Ils font alors plus de 3 000 prisonniers et capturent 20 canons. Leur percée est l'une des plus importantes de cette offensive et Kerenski vient en personne sur le front féliciter les troupes. Ce succès, qui démontre les capacités militaires de la brigade pousse le gouvernement provisoire à faciliter le recrutement des prisonniers de guerre. Le 26 juin, ce sont 15 000 volontaires qui se sont engagés permettant de transformer la brigade en une division.

 

Sur le front, les Austro-hongrois passent à la contre-attaque et repoussent les Tchécoslovaques sur leur position de départ. Des régiments russes se débandent et les Tchécoslovaques perdent pied à leur tour. La bataille de Zborov tourne finalement au désastre. Craignant d'être encerclé, les Tchécoslovaques se replient sur Tarnopol puis se regroupent vers Kiev où ils voient arriver de nouveaux volontaires mais aussi des civils qui cherchent leur protection dans le désordre ambiant.

 

A la fin de l'été 1917, la 1ere division tchécoslovaque, connu sous le nom de division hussite, comporte 4 régiments sous les ordres du général Mamontov. En aout se forme la 2e division qui comprend également 4 régiments. L'ensemble est complété par des brigades d'artillerie et forme le 9 octobre, le corps d'armée tchécoslovaque en Russie sous les ordres du général Shokhorov. Il dépend sur le plan militaire du Grand quartier général russe et sur le plan administratif du bureau régional du conseil national tchécoslovaque. Les efforts de Tomas Masaryk permettent d'atteindre le nombre de 50 000 soldats et la création d'une brigade de réserve et d'un bataillon de choc. Le 7 février 1918, le corps tchécoslovaque en Russie est intégré à l'armée autonome tchécoslovaque dont le quartier général est en France, un pas supplémentaire vers la légitimité et l'indépendance.

 

La majorité des légionnaires tchécoslovaques reste neutre au milieu des soubresauts de la Révolution russe. Ne fait exception que la compagnie de volontaires tchécoslovaques formée au sein de la 8e armée russe commandée par le général Lavr Kornilov. Quand ce dernier tente un coup d'État en septembre 1917 contre le gouvernement provisoire, la compagnie tchécoslovaque le suit. Après l'échec du coup, ce détachement de choc devient le 1er régiment de choc slave et intègre la 1ere division tchécoslovaque. Mais certains de ces membres suivent Kornilov dans la région du Don où, avec le général Alexeïev, il met sur pied l'Armée des Volontaires.

 

 

Les légionnaires face à la révolution bolchevique.

Avec la révolution bolchévique et la disparition du gouvernement provisoire, les Tchécoslovaques perdent un soutien de poids. Que doivent-ils faire ? Quand les forces bolcheviques conduites par Mikhaïl Mouraviev pénètrent en Ukraine, les Tchécoslovaques signent avec eux un accord garantissant leur neutralité en échange de leur rapatriement. Ailleurs ils aident même les Rouges, par exemple en donnant des armes aux hommes de Vladimir Antonov-Ovsenko pour combattre les Blancs.

 

Quand les Allemands, après la rupture des négociations de Brest-Litovsk pénètrent en Ukraine, les légionnaires sont obligés de partir pour éviter de devenir prisonniers. Cette perspective est d'autant plus nécessaire que les Tchécoslovaques sont toujours considérés comme des sujets austro-hongrois et à ce titre, s'ils tombent aux mains des armées des Puissances centrales ils sont considérés comme des traitres passibles de la peine de mort. Cette retraite en direction de la Volga ne se fait pas sans combat comme à Doch, Korostychev mais surtout à Bakhmach. Dans ce lieu, un nœud ferroviaire important, les combats durent 6 jours et immobilisent deux divisions allemandes. Cette action facilite l'évacuation de la 1ere division tchécoslovaque qui arrive du sud de Kiev et sécurisent la retraite de l'ensemble des légionnaires.

 

Masaryk est en Russie depuis mai 1917. Ce dernier craint que si les Tchécoslovaques restent en Russie ils ne succombent à la propagande communiste. Des agitateurs envoyés par le Soviet de Kiev ont déjà essayé d'amener les soldats à rejoindre l'Armée rouge tandis que des Tchécoslovaques communistes ont formé un comité, un journal, et occupé de force les locaux du comité national à Petrograd se proclamant comme le seul représentant des Tchécoslovaques en Russie. Les consignes de Masaryk sont simples, les Tchécoslovaque doivent conserver leurs armes, rester neutre dans la guerre civile et essayer de regagner le front occidental dans les plus brefs délais.

 

Les unités tchécoslovaques deviennent alors la légion tchécoslovaque, intégrée à l'armée française, et dépendante de la commission franco-anglo-tchéque dirigée par Maurice Janin, Alfred Knox et Milan Stefanik. Les officiers russes sont éliminés au profit de cadres tchécoslovaques sous les ordres des généraux Cecek, Sirovy et Gajda. Mais le problème du rapatriement est posé. La route de Mourmansk est bloquée en raison de la présence de U-boots alors que les Allemands, contrôlant Rostov et Tbilissi, il est impossible de passer par la mer Noire. La seule issue est d'emprunter le Transsibérien de Kazan à Vladivostok, soit 8 000 km.

 

A Penza, le 18 mars, des négociations se nouent entre les Tchécoslovaques et les bolcheviks. Ces derniers veulent le désarmement des légionnaires et Staline, le négociateur, propose que les Tchécoslovaques quittent la Russie par la Sibérie en tant que civil mais en disposant de certaines armes pour se défendre. Les Tchécoslovaques acceptent l'accord le 26 mars. Mais seulement un tiers des légionnaires parviennent ainsi à Vladivostok, le reste se retrouvant éparpillé le long du Transsibérien ou bloquer par les bolcheviks à différents endroits.

 

A Moscou, l'ambassadeur allemand von Mirbach demande l'arrestation et le désarmement des Tchécoslovaques. Les Allemands craignent en effet la présence de ces troupes toujours fidèles aux Alliés sur leurs arrières en Russie. Les bolcheviks demandent donc aux Tchécoslovaques de livrer plus d'armes que prévu dans l'accord du 26 mars. Obéissant à la consigne de Masaryk de rester neutre, les légionnaires obtempèrent. Le 21 avril, Tchitcherine le commissaire du peuple aux Affaires étrangères écrit au soviet de Krasnoïarsk que les Allemands, craignant une invasion de la Sibérie par les Japonais, exigent que les prisonniers de guerre allemands soient transférés par tous les moyens possibles de Sibérie en Russie centrale. Il ordonne aussi que le voyage vers l'est des Tchécoslovaques, considérés comme des rebelles, empêchant le pouvoir soviétique de prendre le contrôle de la Russie, soit stoppé. Cette décision est peut-être aussi un moyen de les forcer à se fondre dans l'Armée rouge.  

Unité de la légion tchécoslovaque en 1918.

Unité de la légion tchécoslovaque en 1918.

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe.
30 juillet 2014 3 30 /07 /juillet /2014 07:56
Le général Pilsudski.

Le général Pilsudski.

La Grande Guerre, par son ampleur, ses destructions incommensurables, son étendue géographique, sa durée, a presque totalement éclipsée le souvenir des multiples petits conflits qui, entre la fin de 1918 et 1920 touchent l'est de l'Europe. C'est le sort que connaît la guerre soviet-polonaise de 1920, souvent traitée comme l'appendice final de la guerre civile russe. Guerre de libération nationale ou croisade révolutionnaire, ce conflit présente un mélange de pratiques obsolètes et d’éléments stratégique novateurs, les charges de cavalerie se font au service d'une tactique qui préfigure la guerre éclair.

 

Le conflit entre la Pologne et la Russie prend racine en 1815 quand le congrès de Vienne entérine les différents partages de la Pologne opérés au XVIII° siècle par la Russie, la Prusse et l'Autriche. Depuis, l'aspiration à la résurrection d'une Pologne indépendante marque profondément l'identité nationale polonaise. Et ce que trois insurrections et des décennies de résistance aux entreprises de russification ou de germanisation n'ont pu accomplir, la guerre de 1914-1918 va le réaliser. En 1916, les Allemands qui ont envahi la Pologne russe acceptent la formation d'un Royaume de Pologne semi-autonome. Les Alliés ne peuvent alors aller aussi loin sans mécontenter la Russie de Nicolas II. Mais quand celle-ci se retire du conflit au début de 1918, le président américain Woodrow Wilson peut inscrire dans ses 14 points, qui deviennent les buts officiels de guerre des Alliés, la création et l'indépendance de la Pologne. En octobre 1918 quand, face à l'effondrement des Puissances centrales, le conseil de régence à Varsovie proclame l'indépendance de la Pologne, les Alliés entérinent la naissance du nouvel État.

 

Il faut pourtant attendre la conférence de Versailles, où les grands vainqueurs de la guerre, redessinent la carte de l'Europe pour connaître le contour du jeune État polonais. Mais les Alliés font alors face à une difficulté de taille. La Russie, devenue depuis 1917, le premier État communiste au monde, n'a pas été invité à participer à la conférence. Si les Alliés ne désespèrent pas de la chute prochaine des Soviets et soutiennent de nombreux efforts en ce sens, ils sont malgré tout incapables de déterminer les frontières à l'est de l'Europe, notamment celle qui doit séparer la Pologne de son voisin russe.

 

Pendant ce temps les Polonais se donne pour chef de l’État, Jozef Pilsudski. Ce dernier, ancien membre du Parti socialiste polonais, fut exilé par les autorités tsaristes pendant 5 ans en Sibérie. Farouchement anti-russe, il devient un fervent nationaliste. Pendant la Grande Guerre, il n'hésite pas à prendre la tête d'une légion polonaise qui combat sur le front oriental au sein de l'armée autrichienne. Refusant de prêter une allégeance totale aux Puissances centrales ils se retrouvent en prison à Magdebourg pour deux ans. Libéré en novembre 1918, il devient le héros national de la Pologne.

 

Pilsudski a alors pour objectif de faire retrouver à la Pologne ses frontières de 1772, frontières qui englobe non seulement la Pologne mais également l'Ukraine, la Biélorussie et la Lithuanie. Il envisage donc de former une fédération des petits États issu de l'éclatement de l'empire tsariste qui puisse freiner les aspirations impérialistes de la Russie et de l'Allemagne. Cette ambition se heurtent à la volonté des Alliés qui veulent imposer comme frontière avec la Russie la ligne fixée par lord Curzon, ministre britannique des Affaires étrangères. Cette ligne qui laisse des milliers de Polonais à l'est du Bug en dehors de la Pologne n'est pas acceptée par cette dernière alors qu'à l'ouest les Alliés hésitent à lui donner la région minière de Silésie pour ne pas mécontenter les Allemands. Les Ukrainiens et les Lithuaniens qui viennent juste d'accéder à une indépendance encore précaire rejette tout autant le projet polonais de fédération que les ambitions territoriales de la Pologne. Les Français et les Britanniques mettent en garde les Polonais contre ces projets impérialistes et leur demandent de se contenter des territoires ethniquement polonais.

 

Au moment où l’État polonais renait, Lénine ordonne à l'armée rouge d'avancer à l'ouest reprendre les territoires occupés jusque là par les armées allemandes. Cette marche vers l'ouest fait face rapidement à l'émergence de pouvoir locaux, expressions des aspirations nationales des peuples de l'ancien domaine des Tsars. Les Soviétiques se heurtent donc aux Ukrainiens, aux Lettons, Estoniens, Lithuaniens et évidemment aux Polonais. Ces derniers affrontent l'armée rouge au printemps 1919. Mais les Soviétiques doivent à nouveau faire face à la menace des armées blanches soutenues par des détachements militaires alliés. La menace de Denikine est plus sérieuse que celle de Pilsudski. Profitant de la faiblesse russe, les Polonais poursuivent leur avance en Biélorussie. Ils s'emparent de Vilnius dont les Lithuaniens avaient fait la capitale de leur jeune république et atteignent la Daugava. Pour les Polonais, il s'agit surtout de mettre les Alliés devant le fait accompli afin qu'ils reconnaissent des frontières orientales polonaises élargies. A la fin de 1919 les Polonais occupent ainsi de larges parties de la Biélorussie, de la Galicie et de l'Ukraine.

 

Au début de 1920, la situation a évoluée. La guerre civile russe connait ses derniers soubresauts au profit des bolcheviks. Ces derniers peuvent de nouveau tourner leur regard vers l'ouest. Ils concentrent prés de 700 000 hommes prés de la Berezina en Biélorussie. Persuadé, à juste titre, que les Russes s'appretent à passer à l'attaque, les Polonais veulent les prendre de vitesse en attaquant les premiers en Ukraine. Ils comptent s'appuyer pour réussir sur le soutien de l'ataman ukrainien Semyon Petlioura. Ce dernier, qui se bat depuis 1918 pour l'indépendance de l'Ukraine signe en décembre 1919 un accord avec la Pologne. Il accorde à celle-ci la Galicie orientale et la Volhynie occidental en échange de son aide afin qu'il puisse reprendre Kiev et étendre l'Ukraine indépendante jusqu'au Dniepr.

 

Pilsudski ordonne d'abord a ses troupes de marcher sur le nord, aider l'armée lettone à chasser les Soviétiques des rives de la Dvina. Les Polonais parviennent ainsi à s'emparer du point clé que constitue la forteresse de Dvinski le 3 janvier 1920 obligeant les Soviétiques à négocier. Mais Pilsudski, convaincu que les bolcheviks ne cherchent qu'à gagner du temps, fait trainer les pourparlers sur la définition de la frontière. Durant les mois d'hiver, il prépare son pays à la guerre. Les services de renseignements polonais concentrent l'essentiel de leur activité à suivre les mouvements des troupes soviétiques tandis qu'environ 100 000 soldats polonais sont déployés sur un front de près de 1000 km.

 

Les Alliés, apprenant les préparatifs polonais, mettent en garde Pilsudski. Lord Curzon le prévient le 9 février qu'il ne doit pas compter sur le soutien britannique. Le Conseil suprême Allié transmet une déclaration identique. Mais les services de renseignements polonais ne cessent d'annoncer l'arrivée quotidienne sur le front occidental de nouvelles troupes soviétiques. Pilsudski décide alors de passer à l'attaque. Son plan consiste à d'abord battre les Soviétiques au sud pour permettre la formation d'une République indépendante d'Ukraine sous la direction de Petlioura. L'armée que ce dernier doit mettre sur pied permettra alors aux troupes polonaises de remonter dans le nord où Pilsudski prévoit que doit se dérouler la bataille décisive. Avec la conclusion le 21 avril d'un accord militaire avec Petlioura, les Polonais sont enfin prêts pour passer à l'offensive.

L'avancée polonaise en Russie.

L'avancée polonaise en Russie.

Opération Kiev

Le 25 avril 1920, la 3° armée polonaise, commandé par le général Rydz-Smygli et accompagnée par deux divisions d'infanterie ukrainiennes, s'engage dans une offensive en profondeur en Ukraine. Face à elle se trouvent les 12 et 14° armées rouges commandées par le général Alexandre Iegorov. Les lanciers polonais, après avoir bousculé les troupes frontalières soviétiques, détruisent la 12° armée rouge, foncent en direction du Dniepr et s'emparent facilement de Kiev le 7 mai. Le gouvernement polonais proclame alors qu'il est venu apporter sa protection aux Ukrainiens qui doivent s'armer pour combattre les bolcheviks et gagner leur liberté avec l'aide de la Pologne.

 

Mais les Soviétiques se rassissent rapidement. D'abord ils n'ont pas été battu mais se sont replié en ordre derrière le Dniepr. Les Polonais n'ont d'ailleurs pu établir qu'une petite tête de pont sur la rive orientale du fleuve et dès la fin mai ils doivent affronter les contre-attaques soviétiques. Le 26 mai 1920, des unités soviétiques appuyées par la 1° armée de cavalerie rouge attaquent autours de Kiev. Après une semaine de combat les Polonais rétablissent leurs positions. Au nord la 1° armée polonaise est battu et doit évacuer les territoires entre la Dvina et la Berezina pour stabiliser le front sur la rivière Auta.

 

Les Polonais se montrent rapidement incapable d'être à la hauteur de l'ambitieux plan stratégique de Pilsudski. Leur avance rapide sur Kiev a ainsi démesurément étendu leur ligne de ravitaillement. De plus ils ne trouvent guère de soutien parmi les populations ukrainiennes qui sont autant ant-russe qu'anti-polonaises. Alors que les Polonais espéraient la formation d'une armée ukrainienne nombreuses leurs espérances sont vite déçus. Les forces ukrainiennes sont incapables de tenir le front face aux Soviétiques obligeant les unités polonaises à rester en Ukraine.

 

Les troupes polonaises doivent alors tenir un front de plus de 300 kilomètres avec seulement 120 000 hommes appuyé par 460 pièces d'artillerie. Les généraux polonais s'inspirant de la guerre sur le front occidental souhaitent établir une ligne de défense linéaire couvrant l'ensemble du front. Mais à la différence du front occidental saturé de mitrailleuses, de canons et de troupes, le front polonais est pauvre en homme et en artillerie et ne dispose d'aucun ouvrage fortifié. A cela s'ajoute le fait que les Polonais ne dispose d'aucune réserve stratégique pour pallier une éventuelle percée ennemie.

 

De leur coté les Soviétiques ne cessent de se renforcer. Le fer de lance de l'armée rouge, la première armée de cavalerie rouge, commandé par le général Semyon Boudienny, et qui rassemble prés de 16 000 cavaliers appuyés par 5 trains blindés rejoint ses positions de départ sur le front ukrainien à la fin mai. Au nord, prés de 100 000 soldats rouges sont mobilisés. Il ne fait pas de doute que les Soviétiques veulent frapper un grand coup mais veulent-ils seulement infliger une correction aux Polonais ?

 

Au début de 1920, conscient que la guerre civile est gagnée Lénine développe l'idée d'exporter la révolution en Europe occidentale par le biais des soldats de l'armée rouge. Et le plus court chemin pour atteindre Berlin puis Paris passe par Varsovie. Sinon, la Russie soviétique restera une forteresse isolée, d'autant plus fragile qu'elle est ruinée par des années de guerre.

 

A suivre...

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5 juin 2014 4 05 /06 /juin /2014 06:59

Michael Occleshaw, Dances in Deep Shadows: The Clandestine War in Russia, 1917-1920, Carroll and Graf, 2006.

Guerre secréte contre la Russie soviétique

L'intervention étrangère dans la guerre civile russe est un phénomène bien connu même s'il est considéré comme relativement mineur, les Alliés cherchant à protéger les dépôts d'armes fournies à la Russie tsariste, à soutenir les forces blanches et à rouvrir la guerre sur le front de l'Est. En se penchant sur le rôle des services secrets britanniques dans l'intervention en Russie, Michael Occleshaw, remet en question certains de ces présupposés. Pour lui l'objectif premier des Britanniques en Russie n'est pas de faire rentrer la Russie dans la guerre ou de protéger des biens anglais mais plutôt de placer l'ancien Empire des tsars dans une situation de dépendance politique et économique afin qu'il forme une sorte de rempart oriental pour l'Empire britannique. La thèse est hardie et finalement peu convaincante. Mais la mise en lumière de la guerre clandestine que livrent les Britanniques à la Russie soviétique justifie la lecture de ce livre.

 

Certaines opérations secrètes frisent le ridicule comme celle prévoyant de mettre à genoux la Russie en prenant le contrôle de ses principales banques par l'achat d'actions. Le projet échoue finalement quand les bolcheviks nationalisent les banques. Tout en négociant avec les bolcheviks, les Britanniques mettent également au point un plan pour la création d'un État cosaque indépendant. L'épisode central du livre d'Occleshaw est constitué par le récit du complot Lockhart qui a visé à retourner un régiment de fusiliers lettons afin d'arrêter et d'exécuter Lénine et Trotsky en septembre 1918. Sydney Reilly, l'espion qui servit de modèle pour le personnage de James Bond, joua un rôle central dans cette opération qui fut un nouvel échec cinglant.

 

Si le livre se lit comme un roman d'aventures, il arrive aussi que le lecteur se trouve perdu entre les différents personnages présentés, les différentes opérations envisagées ou réalisées. Surtout que l'auteur peine parfois à organiser son matériel de façon cohérente ce qui rend la lecture souvent difficile. Néanmoins il offre une vue complète des actions secrètes lancées par les Britanniques contre la jeune Russie soviétique. Il souligne au passage que ces interventions clandestines, qui marquent le début effectif de la guerre froide, ouvrent une époque nouvelle où les services secrets jouent un rôle beaucoup plus important qu'auparavant dans les relations internationales. Surtout Occleshaw montre qu'en finançant et en apportant leur aide aux Blancs, l'intervention alliée fut une entreprise médiocre et sans gloire qui fut payé par la vie de centaines de milliers de Russes.

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe.
10 mars 2014 1 10 /03 /mars /2014 08:00

Ferdinand Ossendowski, Bêtes, Hommes et Dieux. A travers la Mongolie interdite, 1920-1921, Phebus, 2011 (1ere édition 1924).

Aventures en Mongolie au temps de la guerre civile

Voici un livre inclassable et curieux. Nous l'avons lu dans une édition d'une collection de livres de poche où il côtoie des titres sur les grands thèmes de l'ésotérisme, de l'Atlantide aux géants de l’île de Pâques en passant par les Templiers et les Rose-Croix. Ce n'est pas que nous cherchions à nous évader des livres d'Histoire qui sont notre pain quotidien mais plutôt à retrouver le plaisir que nous avons eu il y a quelques décennies à nous plonger dans Corto Maltése en Sibérie. Et ce livre a répondu à notre attente.

 

L'auteur, Ferdinand Ossendowski, y raconte le périple qu'il a affronté en fuyant par l'est la guerre civile russe pour se retrouver en Mongolie où il fut rattrapé malgré tout par la lutte acharnée que se livraient Blancs et Rouges. Ossendowski, né en Pologne russe, ingénieur, se trouve à Omsk au moment de la révolution d'octobre. Il rejoint les troupes blanches de l'amiral Koltchak mais après la victoire de l'Armée rouge il est obligé de fuir. C'est cette fuite que raconte son livre.

 

L'auteur cherche à rejoindre les Indes britanniques en passant par la Mongolie et le Tibet. Mais il doit finalement renoncer et retourne en Mongolie dans l'espoir de rejoindre la cote Pacifique. Son chemin est parsemé d'aventure, entre combats contre les rouges, les bandits tibétains ou les Chinois. Il fait la connaissance de personnages plus surprenants les uns que les autres, chercheurs d'or, agents bolcheviks, princes mongols, chamans et moines bouddhistes. Il rencontre le Bogdo-Khan, le dieu vivant qui règne alors sur la Mongolie et le célèbre général Ungern von Sternberg dont il fait un portrait à mille lieues de celui du baron sanglant.

 

Le lecteur peut douter de la véracité des faits exposés, sourire devant les considérations de l'auteur sur l'existence d'un Roi du Monde vivant dans un royaume souterrain. Ossendowski donne, néanmoins un aperçu vivant d'un pays, la Mongolie, à un tournant de son histoire. Théâtre de la guerre civile entre Blancs et Rouges, rejetant la tutelle chinoise, le pays, où les habitants semblent encore vivre comme à l'époque de Gengis Khan, cherche sa voie, ballotté par les grands courants de l'Histoire. L'extrême confusion et la violence qui président à ces bouleversements sont restituées avec force dans ce livre.

 

Mélangeant aventure, voyage, mystères et grande Histoire, le livre d'Ossendowski est un récit palpitant qui nous a redonné envie de replonger dans les aventures du célèbre héros de Hugo Pratt.

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe.
4 novembre 2013 1 04 /11 /novembre /2013 07:13

La division occidentale polonaise.

Fin juillet-début aout 1918 commence l'organisation de la plus grande formation révolutionnaire polonaise, la division d'infanterie occidentale. Elle voit le jour officiellement le 15 octobre 1918 sous la direction de Zbikowski qui est ensuite remplacé par Roman Lagwe. Les commissaires politiques sont Adam Slawinski et Stanislac Bobinski. La division, qui compte 8 000 hommes, est organisée suivant la structure de l'armée rouge et possède donc trois brigades : la 1° brigade de tirailleurs commande par Roman Lagwe puis Wladislaw Scibor qui comprend le régiment rouge de Varsovie qui devient à partir de décembre 1918 le régiment de tirailleurs de la division occidentale de Varsovie. La brigade comprend également le 3° régiment révolutionnaire de Siedlce, le 1° régiment de hussards rouges de Varsovie fondé à l'été 1918 sous le commandement de Wladyslaw Kolankowski et le 1° bataillon d'artillerie légère.

 

La 2° brigade commandée par Francis Makowski est constituée du 2° régiment révolutionnaire de Lublin, du 4° régiment révolutionnaire de Varsovie, du régiment rouge de cavalerie de Mazowiecki et du 2° bataillon d'artillerie légère. La 3° brigade dirigé par Kazimierz Majewski puis à partir de mars 1919 par Dobrowolski comprend le 5° régiment révolutionnaire de Vilnius, le 6° régiment révolutionnaire de Grodno, le 1° régiment de hussard rouge de Varsovie et le 3° bataillon d'artillerie de campagne. La division comprend également une unité de reconnaissance, un bataillon de transmission, un bataillon du génie, un escadron aérien avec trois appareils, un hôpital de campagne et une unité vétérinaire.

 

La division est sous l'autorité politique d'un Conseil militaire révolutionnaire qui comprend Samuel Lazowert, Stefan Brodowski qui vient du comité exécutif central du groupe du SDKPiL en Russie et Adam Kaczorowski (Slawinki) du parti bolchevik. Le bureau d'enrôlement est dirigé par Romuald Muklewiczow, nommé le 14 janvier 1919 par le Conseil militaire révolutionnaire et qui dirige une trentaine de bureaux de recrutement en Russie, Ukraine, Biélorussie et Lituanie.

 

Des formations militaires polonaises continuent à exister sans entretenir de liens avec la division d'infanterie occidentale. C'est le cas notamment des Révolutionnaires rouges polonais à Irkoutsk, du détachement polonais combiné d'Ousman, des unités polonaises de garde des chemins de fer l'une à Petrozavodsk en Carélie et l'autre à Voronej, du bataillon polonais Josef Mirecki à Orel, du bataillon polonais d'Odessa, de deux régiments issus du régiments de Varsovie : le 2° régiment de Cracovie commandé par le capitaine Gendygery et le 3° régiment de Poznan commandé par l'adjudant Boleslaw Pilecki. Le nombre total de Polonais servant dans l'armée rouge est difficile à déterminer et selon certains historiens il se situerait autour de 100 000. Ces derniers viennent de milieux divers: ouvriers, nobles ou bourgeois. Certains sont issus de familles dont l'histoire est liée au mouvement indépendantiste comme Stanislaw Zielinski, un des organisateurs du régiment révolutionnaire de Varsovie et qui fut diplômé de l'école rouge des communards, une école politique et militaire pour les révolutionnaires polonais.

 

Les unités polonaises s'adaptent aux conditions tactiques de la guerre civile russe. Il n'est plus question d'un front défensif marquée par une ligne continue de tranchée. La guerre civile marque le retour des manœuvres tactiques où les lignes de tranchées sont remplacée par des chaines de points fortifiés. Dans ce système les réserves jouent un rôle primordial puisqu'elles sont utilisées pour lancer des offensives en profondeur, contourner les défenses ennemies et sécuriser les flancs. Ces tactiques, plus ou moins perfectionnées par les belligérants, sont utilisées par les unités révolutionnaires polonaises.

Affiche de propagande soviétique lors de la guerre avec la Pologne

Affiche de propagande soviétique lors de la guerre avec la Pologne

En février 1919 la division occidentale polonaise occupe progressivement la Biélorussie d'où se retire lentement les troupes d'occupation allemandes. Des escarmouches éclatent avec des troupes de l'armée polonaise organisée par Pilusdski qui se sont avancées jusqu'aux rives du Niémen. A partir du printemps les affrontements se font plus violents notamment à compter du 16 avril où la ville de Lida est prise et reprise plusieurs fois par chaque camp. En mai la division occidentale participe à la retraite de l'Armée rouge en Biélorussie. Elle tient le secteur de Pierszoj prés de Minsk ainsi que celui de Kleck sur la rivière Lan. Elle s'illustre lors des féroces combats à Baranovitch dans la banlieue de Minsk. La division est alors intégrée le 9 juin 1919 à la 16e armée rouge en temps que 52e division d'infanterie. Elle incorpore alors des Russes, des Biélorusses et des Ukrainiens et perd définitivement son caractère polonais.

 

En août 1920, lors de l'avance de l'armée rouge sur Varsovie le comité révolutionnaire polonais décide de créer sous le commandement de Roman Lagwa la 1ere armée rouge polonaise. Mais la retraite soviétique puis la démobilisation de l'armée rouge après la guerre interrompent la formation de cette armée. Aucune des formations militaires polonaises créés en Russie soviétique n'arrive à exporter la Révolution en Pologne. Il faut attendre mai 1943 pour que l'URSS mette sur pied sur son territoire une armée polonaise dirigée par le général Berling qui jouera un rôle clef dans l'imposition du régime communiste dans la Pologne occupée par les Soviétiques à partir de 1944.

Milice ouvrière dans la Pologne occupée par l'Armée rouge l'été 1920

Milice ouvrière dans la Pologne occupée par l'Armée rouge l'été 1920

Sources :

-A.Manusevich, Internatsionalistyi.Trudyaschiesya zarubezhnyih stranuchastniki borbyi za vlast sovetov, Editions Nayka, Moscou, 1967.

 

-Mieczysław Wrzosek, Polski czyn zbrojny podczas pierwszej wojny światowej 1914-1918, Państwowe Wydawnictwo „Wiedza Powszechna”, Warszawa 1990.

 

http://lewica.pl/?id=25503

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communismeetconflits - dans Guerre civile russe. Armée rouge

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GuideICSerge Wolikow, Alexandre Courban, David François, Christian Oppetit, Guide des archives de l'Internationale communiste, 1919-1943, Archives nationales-MSH Dijon, Paris-Dijon, 2009. 

9782749110356Serge Wolikow (sld), Pierre Sémard, Le Cherche-Midi, Paris, 2007, (Rédaction du chapitre "La mise à l'écart (1929-1932)")

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